Isvara pranidhanat va
Ou par un abandon complet et total à une puissance supérieure
—Yoga Sutra I.23
Il y a plusieurs années, une amie faisait un trekking en haute altitude au Bhoutan avec son mari et son beau-fils. Trois guides locaux les accompagnaient, avec des chevaux pour transporter leur nourriture et leur équipement. Une neige légère a commencé à tomber, les prenant par surprise, car ce n’était pas la saison pour cela. En quelques instants, ils se sont retrouvés dans un blizzard, incapables de voir leurs propres mains devant leurs visages. Les chevaux effrayés se sont enfuis, emportant toutes leurs provisions. Mon amie, sa famille et les guides se sont blottis sous un surplomb rocheux, ne sachant pas si la tempête durerait des heures, des jours ou même des semaines. Ils n’avaient ni nourriture, ni vêtements chauds, ni GPS. Ils étaient vraiment, désespérément perdus. Heureusement, la tempête était passée le matin et mon amie et ses compagnons ont finalement pu redescendre en lieu sûr.
Au cours de ces longues heures passées dans le froid, l’humidité et blotti sous la roche – des heures qui auraient très bien pu être les dernières de mon amie sur Terre – elle m’a dit qu’elle n’était pas saisie par la terreur, la panique, le blâme ou le regret. Sans nier la gravité de la situation, ni ses peurs, elle a gardé l’esprit clair en concentrant ses pensées sur le soleil, à la fois comme source de chaleur physique et comme symbole de la lumière qui dissipe les ténèbres, et en pensant avec amour à sa fille à la maison. Mon amie a dit qu’elle ressentait un profond sentiment de stabilité et de calme, une confiance dans l’ordre du monde, sachant que même si elle ne pouvait pas voir le soleil, il continuait à se lever et à se coucher comme il le faisait tous les jours, et elle faisait confiance qu’il ressusciterait. Elle sentait que même si le soleil ne brillait pas sur leur petit abri à temps pour qu’ils reviennent vivants (bien qu’elle l’espérait vraiment), elle serait en paix.
Ce qui m’a le plus frappé dans l’histoire de mon ami, c’est la façon dont cette expérience de clarté et de confiance illustre ce à quoi Patanjali fait référence dans Yoga Sutra I.23 avec l’introduction d’Isvara pranidhana : un abandon total à une puissance supérieure, quel que soit le résultat. Offres Patanjali Isvara pranidhana comme la première des neuf solutions possibles pour stabiliser l’esprit vacillant et se libérer de l’agitation et de la souffrance face aux obstacles potentiels (car, après tout, les obstacles ne sont vraiment des obstacles que s’ils vous agitent).
Cet abandon total ne signifie pas que vous niez votre situation. Ce n’est pas la croyance que tout « ira pour le mieux », et ce n’est pas une foi aveugle que tout se passera comme vous le souhaitez. Aucun de nous n’est à l’abri de la maladie et des difficultés, quelle que soit notre foi ou la force de nos croyances. Au contraire, Isvara pranidhana fait confiance à l’ordre de l’univers, dont la vie et la mort, la joie et le chagrin font tous partie. Cela signifie que même si le résultat n’est pas ce que vous auriez souhaité, même si c’est difficile ou douloureux, même si cela signifie votre propre mort, ou la mort d’un être cher, vous y faites face avec une profonde acceptation. Donc, si vous êtes pris dans un blizzard, Isvara pranidhana ne signifie pas avoir la foi que vous serez secouru. Cela signifie accepter que vous pourriez ne pas vous en sortir vivant et trouver de la facilité dans cet abandon complet à quelque chose au-delà de vous-même, au-delà de votre pensée cognitive ou de votre compréhension, même si vous continuez à faire activement tout ce que vous pouvez pour survivre.
Isvara pranidhana, explique Patanjali, est disponible pour tous ceux qui le choisissent, pas seulement pour ceux qui ont un système de croyance particulier. La description de Patanjali d’Isvara est universelle par conception et est destinée à être utile à ceux de toute croyance religieuse ou spirituelle, et même aux agnostiques ou aux athées. Dans le Yoga Sutra I.24, Patanjali définit Isvara comme un purusa spécial, qui peut être traduit par un « être spécial », une « âme », une « énergie divine », une « puissance supérieure » ou un « Dieu », selon votre orientation et confort.
Patanjali décrit cet être spécial d’une manière à laquelle nous pouvons nous identifier et aspirer en tant qu’êtres humains : comme quelqu’un qui n’est pas touché par les conséquences du cycle de la souffrance basée sur de mauvaises actions. Patanjali poursuit en expliquant qu’au sein d’Isvara se trouve une compréhension extraordinaire au-delà de tout, qui est la source de toute connaissance, l’enseignant de tous les enseignants.
Dans les termes les plus simples et les plus neutres, Isvara peut être considérée comme un symbole intemporel de la compréhension la plus élevée, de la clarté représentée par la lumière qui éclaire l’obscurité, tout comme le soleil continue de se lever chaque jour, dissipant l’obscurité de la nuit et apporter une nouvelle vie et une nouvelle croissance.
Abandon quotidien
Bien que les situations de vie ou de mort comme celle vécue par mon ami ne soient heureusement pas la norme, chacun de nous fait face chaque jour à ses propres «tempêtes de neige» de proportions variables. Peut-être que vous n’obtenez pas l’emploi que vous vouliez ou que vous ne recevez pas la reconnaissance que vous estimez mériter. La vie peut vous présenter un certain nombre de déchirements sous forme de mort, de perte et de déception. Chacun de ces cas est l’occasion de voir qu’il peut y avoir une grande liberté et une grande facilité à abandonner l’illusion de contrôle sur votre situation.
Avec cette connaissance, vous continuez à agir de la meilleure façon que vous savez, au mieux de vos capacités. Vous espérez toujours, rêvez ou priez pour – et poursuivez – ce que vous attendez de la vie. Mais quand les choses ne se passent pas comme vous l’aviez espéré, vous avez confiance qu’il existe un ordre au-delà de votre connaissance ou de votre compréhension. Vous pouvez avancer avec la paix qui vient du fait d’accepter que le résultat est hors de vos mains, en vous abandonnant à quelque chose de beaucoup plus grand. Et vous découvrez que même lorsque les circonstances échappent à votre contrôle, la vie se déroule souvent très bien, et parfois même mieux que vous ne l’auriez imaginé.
Découvrez votre guide intérieur : une méditation guidée
Trouvez un endroit confortable pour vous asseoir tranquillement. Fermez les yeux, détendez votre menton et votre cou et prenez quelques respirations détendues avec vos mains posées sur vos genoux (ou à vos côtés si vous choisissez de vous allonger sur le dos).
Pendant que vous continuez à respirer confortablement, commencez à visualiser la qualité ou l’image que vous associez le plus à votre puissance supérieure ou à une force supérieure à vous-même. Cela peut être une personne sage ou un ancien que vous respectez, une figure ou un symbole religieux, ou quelque chose dans la nature qui représente pour vous l’ordre de l’univers, quelque chose comme le soleil, la lune, une étoile ou une fleur. Vous pourriez même choisir de vous concentrer sur une qualité telle que la compassion, le respect de la vie ou la joie. Quoi que vous choisissiez, cela devrait ressembler à un soutien positif, quelque chose qui résonne en vous comme un symbole d’Isvara.
Une fois que cette image ou qualité est claire dans votre esprit, prenez le temps de vous asseoir avec elle et assurez-vous qu’elle résonne positivement pour vous. Vous pourriez d’abord visualiser l’océan comme un support apaisant et positif, par exemple, mais commencer ensuite à vous sentir submergé par sa profondeur ou secoué par son mouvement constant. La bonne image peut mettre un certain temps à vous parvenir. Soyez patient et laissez le bon symbole devenir clair sur une période de plusieurs jours, voire de plusieurs semaines.
Inspirez, en ramenant vos paumes vers le haut et ensemble sur votre cœur pendant que vous imaginez amener et remplir votre cœur avec cette image. Expirez, en abaissant progressivement vos paumes en imaginant cette sensation ou cette force émanant de votre cœur dans tout votre corps, imprégnant chaque partie de votre être. Répétez cette opération aussi peu que 3 fois ou jusqu’à 12, selon le temps dont vous disposez. Ensuite, asseyez-vous tranquillement et respirez confortablement pendant quelques instants.
Sachez que cette ressource est toujours en vous, une partie inextricable de votre être même qui est toujours là pour vous soutenir, quoi qu’il arrive autour de vous ou pour vous, et que vous pouvez vous reposer dans le soutien de cette force. Faire cette pratique régulièrement vous aidera à pouvoir accéder à cette ressource pendant les périodes de lutte.
Kate Holcombe est la fondatrice et présidente de la Healing Yoga Foundation à but non lucratif à San Francisco.
